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l’esprit et le corps à combattre avant peu. Cependant Tissapherne croit à une seconde ruse d’Agésilas, et que son dessein est réellement de fondre sur la Carie. Il fait donc passer son infanterie comme la première fois, et place de même sa cavalerie dans la plaine du Méandre. Agésilas, qui n’avait point menti, se dirige immédiatement, suivant sa parole, vers la province de Sardes, marche trois jours à travers le désert sans rencontrer l’ennemi, et procure à son armée des vivres en abondance. À la quatrième journée paraissent les cavaliers ennemis. Le commandant donne ordre au chef des skeuophores de passer le Pactole et d’asseoir un camp ; et là, ceux-ci voyant quelques valets des Grecs s’écarter pour piller, en tuent un grand nombre. Mais Agésilas, qui s’en aperçoit, envoie la cavalerie pour les secourir. De leur côté, les Perses, voyant arriver ce renfort, rassemblent la leur et la font avancer en ordre de bataille. Alors Agésilas, remarquant que les ennemis n’ont pas d’infanterie, tandis qu’il ne lui manquait à lui pas une de ses forces, juge que c’est le moment d’engager l’action, s’il peut. Les victimes immolées, il fait avancer sa phalange contre la cavalerie ennemie ; il ordonne aux hoplites qui ont dix ans de service d’arriver en même temps au pas de course, et aux peltastes de précéder en courant : il commande aux cavaliers de charger, tandis qu’il suivrait en personne avec le reste de l’armée. La cavalerie est reçue par les Perses ; mais bientôt tout le danger venant à peser sur eux, ils plient, et les uns tombent à l’instant dans le fleuve, les autres sont mis en déroute. Les Grecs les poursuivent et s’emparent de leur camp : les peltastes, selon leur habitude, se mettent à piller. Agésilas, enveloppant tout de son armée, ne fait qu’un camp des ennemis et du sien. On fait un butin immense, qui rapporte plus de soixante-dix talents, et l’on prend en outre les chameaux, qu’Agésilas ramena en Grèce.

Pendant que ce combat avait lieu, Tissapherne se trouvait à Sardes ; aussi les Perses l’accusèrent-ils de les avoir trahis, et le roi, regardant Tissapherne comme la cause de ces désastres, envoie Tithraustès lui couper la tête. Cela fait, Tithraustès envoie à Agésilas des députés qui lui disent : « Agésilas, l’auteur de toutes les difficultés entre vous et nous a subi sa peine. Le roi demande que tu t’en retournes dans ton pays, et que les villes d’Asie rendues indépendantes lui payent l’ancien tribut. » Agésilas répond qu’il ne peut adhérer à cette demande