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Potamos, vis-à-vis de Lampsaque. L’Hellespont, dans cet endroit, a près de quinze stades de largeur. Ils y soupent.

La nuit suivante, au point du jour, Lysandre donne le signal de l’embarquement aux troupes qui viennent de prendre leur repas. Il dispose tout pour le combat, arme de mantelets les flancs de ses vaisseaux, et défend que personne quitte son rang et gagne le large. Les Athéniens, au lever du soleil, se placent devant le port en ordre de bataille, le front à l’ennemi. Mais Lysandre ne bougeant point, comme il se faisait tard, ils regagnent Ægos-Potamos. Lysandre fait suivre les Athéniens par les vaisseaux les plus vites, avec ordre d’observer ce qu’ils feront une fois débarqués, et de revenir aussitôt lui en rendre compte. Il ne permet pas à son monde de débarquer avant le retour de ses vaisseaux. Il en fait autant quatre jours de suite, les Athéniens ne cessant de lui offrir le combat.

Cependant Alcibiade, voyant de ses murs[1] les Athéniens mouillés près d’une plage, loin de toute ville, faisant venir par mer leurs vivres de Sestos, éloignée de quinze stades de leur station navale, tandis que l’ennemi est dans un port et près d’une ville où il a tout, leur dit qu’ils ont choisi un mauvais mouillage, et les engage à s’embosser devant Sestos, dans le voisinage d’un port et d’une ville. « Là, dit-il, vous livrerez bataille quand vous voudrez. » Les stratéges, notamment Tydée et Ménandre, le prient de se retirer : ce sont eux qui sont stratéges et non pas lui. Il se retire. Il y avait cinq jours que les Athéniens exécutaient leur manœuvre, lorsque Lysandre donne cette instruction aux navires qui les suivaient par son ordre : quand ils les verront à terre et dispersés dans la Chersonèse, ce qu’ils faisaient chaque jour de plus en plus, et pour aller au loin acheter des vivres et pour narguer Lysandre, ils reviendront vers lui et élèveront en l’air un bouclier. On fait ce qu’il a commandé. Lysandre donne aussitôt l’ordre de naviguer au plus vite. Il est suivi de Thorax et de l’infanterie. Conon, voyant l’ennemi approcher, fait donner le signal pour qu’on se porte en toute hâte sur les vaisseaux ; mais son monde était dispersé ; sur une partie des bâtiments il n’y avait que deux rangs occupés, sur d’autres un seul ; quelques-uns sont tout à fait vides. Le vaisseau de Conon, sept navires qui étaient auprès de lui et la Paralos, gagnent le large ; mais Lysandre prend tous les autres

  1. Il était retiré dans son château de la Chersonèse. Voy. plus haut, I, v.