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rière ; l’autre le poursuit avec des javelots arrondis par le bout et une lance de même forme. Il faut qu’arrivés à la portée du trait, ce dernier lance ses javelots arrondis sur le fuyard, et que, à portée de la lance, il le frappe de son arme. C’est encore une chose excellente, quand ils en viennent aux mains, de tirer à soi son adversaire, puis de le repousser tout à coup ; rien ne vaut mieux pour le jeter à bas. De son côté, celui qui est tiré fera bien de lancer aussitôt son cheval. Par là, il culbutera son adversaire, au lieu d’en être culbuté.

Supposons maintenant deux camps assis l’un en face de l’autre ; on escarmouche des deux parts : on poursuit ses adversaires jusqu’à la phalange opposée, et l’on se replie ensuite sur la sienne. Or, voici, en pareil cas, ce qu’il est bon de savoir : tant que l’on n’est pas loin de son parti, le meilleur et le plus sûr, c’est, après une demi-volte, de se lancer sur l’ennemi et de lui tenir vigoureusement tête ; puis, quand on arrive près du parti opposé, de retenir son cheval en main. De la sorte, on fait certainement du mal aux ennemis, qui ne peuvent vous faire aucun mal.

L’homme a dans la parole, que lui ont donnée les dieux, le moyen d’enseigner à l’homme ce qu’il doit faire ; mais il est clair qu’on ne peut, avec le même moyen, rien apprendre au cheval. Fait-il ce que vous voulez, caressez-le ; châtiez-le, s’il désobéit : voilà comme il apprendra à bien faire son service[1]. Ceci, toutefois, n’est pas long à dire, mais exige une pratique continuelle de l’équitation. Le cheval recevra le mors plus volontiers si, en le recevant, il en résulte pour lui quelque bien ; il sautera les fossés, il s’élancera de bas en haut, il fera tout ce qu’on exigera de lui, si l’obéissance lui procure un peu de repos.

  1. Nous pouvons expliquer cette phrase en disant que le cheval trouvera sa récompense par la conduite sage et la douceur de son cavalier, qui saura, à propos, le retenir s’il fait mal, le laisser aller s’il fait bien, et qu’alors l’animal, étant mis à son aise, ira toujours convenablement, parce qu’il sait qu’il peut compter sur une récompense. L. B.