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son esprit, toutes les grâces de son langage, les devoirs de l’homme envers lui-même, envers ses semblables, et envers la divinité.

Ici, notre philosophe démontre à Aristodème, par des raisonnements dont Cicéron, Fénelon et Bossuet n’ont pas dédaigné la valeur, l’existence de Dieu et l’action conservatrice de sa providence. Là il persifle le sophiste Antiphon, qui lui reproche sa frugalité, sa simplicité et la gratuité de ses leçons. Ailleurs, il réconcilie deux frères, Chéréphon et Chérécrate, et expose à ce dernier les avantages et les douceurs de l’amitié fraternelle. Plus loin, il engage Diodore à se faire un ami sûr, en secourant Hermogène dans la pauvreté ; ou bien il explique à Aristarque comment il vaut mieux exercer un métier que d’être à charge aux siens ou de vivre dans l’oisiveté et dans la misère. S’agit-il des devoirs d’un général, il montre qu’il en sait aussi long sur ce point que les soi-disant professeurs de tactique. Faut-il former quelques-uns de ses élèves à la carrière politique, il donne des conseils de la plus haute importance et de la plus juste application à Glaucon et au jeune Périclès. Des artistes le consultent-ils sur le but, sur les procédés mêmes de leur profession, il leur indique des ressources de conception ou de mise en œuvre, auxquelles ils n’ont point songé. Enfin a-t-il à former ses disciples à la sagesse, à la tempérance, au courage, à la justice, il leur montre, par son propre exemple, comment on arrive à la perfection morale, et il leur raconte, d’après le sage Prodicus, le bel apologue d’Hercule entre le Vice et la Vertu.

La conclusion de tous ces faits, c’est l’injustice de la condamnation de Socrate et la fausseté des deux chefs d’accusation formulés contre lui. Car, en premier lieu, loin d’avoir négligé les dieux d’Athènes, et d’avoir introduit des divinités nouvelles, il a toujours, et partout, enseigné le respect et pratiqué les cérémonies de la religion nationale ; en second lieu, bien loin de corrompre la jeunesse, il a employé tout son esprit, usé de toute son influence, consacré toute sa vie à la rendre meilleure, dévouée à son pays et instruite à faire le bien.