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allaient la visiter, afin de la prendre pour modèle, et qu’elle ne leur faisait point un mystère de ses charmes. « Il faut aller la voir, dit Socrate ; car ce n’est pas en écoutant qu’on peut apprendre ce que la parole ne peut exprimer. » Alors le narrateur : « Ne perdons pas de temps, dit-il ; nous vous accompagnons. » Cela dit, ils vont chez Théodote, et la prenant au moment où elle posait devant un peintre, ils se mettent à la considérer. Quand le peintre eut fini : « Mes amis, dit Socrate, est-ce nous qui devons savoir gré à Théodote de nous avoir laissé contempler sa beauté, ou bien doit-elle nous remercier de l’avoir contemplée ? Si ce spectacle lui a été le plus utile, ne nous doit-elle pas de la reconnaissance, et si c’est nous qui avons le plus gagné, ne devons-nous pas être reconnaissants ? » Quelqu’un ayant remarqué qu’il parlait juste : « Je conviens, dit-il, qu’elle ne gagne avec nous que des éloges ; mais comme nous nous les répandons, ils lui seront fort utiles. Pour notre part, nous emportons le désir de toucher ce que nous avons contemplé, nous nous en allons mordus au cœur, poursuivis par le regret ; et tout cela fait que nous sommes les esclaves et elle la souveraine. Alors Théodote : « Par Jupiter ! dit-elle, s’il en est ainsi, il faut que je vous remercie de vous avoir offert le spectacle. »

Sur ce point, Socrate la voyant superbement parée, et, près d’elle, sa mère en habits et en toilette peu commune, puis des servantes nombreuses, accortes, et proprement vêtues, une maison enfin abondamment pourvue de tout ce qu’il faut : « Répondez-moi, Théodote, lui dit-il, avez-vous des terres ? — Aucune. — Vous avez donc une maison qui vous fournit des revenus ? — Je n’ai pas de maison. — Mais vous avez des ouvrières ? — Je n’ai point d’ouvrières. — Où prenez-vous donc de quoi vivre ? — S’il m’arrive quelque ami qui veuille me faire du bien, c’est de quoi je vis. — Par Junon, dit Socrate, ma Théodote, c’est une belle acquisition, et mieux vaut acquérir un troupeau d’amis que de brebis, de bœufs ou de chèvres ! Mais vous abandonnez-vous à la fortune, attendez-vous qu’un ami se prenne à vous comme une mouche, ou bien employez-

    la Grèce subjuguée par une Sicilienne : ce que n’avaient pu, dit-on, ni les armées des Perses, ni la politique insidieuse des Spartiates. On sait d’ailleurs à quel degré d’illustration parvint Aspasie, et quels honneurs on rendit à Phryné durant sa vie, et à Pythionice, même après sa mort. Son mausolée, érigé entre Athènes et Éleusis, était le plus superbe monument qui existât dans toute l’étendue de la Grèce, de l’aveu de Dicéarque et de Pausanias, qui l’avaient vu. »