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NOS MAÎTRES

suite des analyses, un emportement plus continu de la phrase musicale ; et des allégros furieusement vulgaires, coupés de quelque gracieuse danse ou d’un bref repos un peu triste.

À l’art furent donnés quelques maîtres admirables qui créèrent sagement, par les procédés spéciaux de leur temps et de leurs arts, une réelle vie bienheureuse : Platon et le Vinci, et Rubans, et Bach, et Racine, et Franz Hals qui sut comprendre le secret de la sensation. Mais un seul homme a été, qui vraiment fut un artiste : Beethoven, seul de tous, a constamment et dans une entière conscience, institué au-dessus de la réalité habituelle le monde artistique d’une réalité meilleure : il a balayé de son art les immondices et les ornements inutiles, il a connu et recréé tous les domaines à jamais possibles, peut-être, de son art ; il a soumis ses œuvres, sans arrêt, à une théorie, mais à une théorie sérieuse et vivante et qui nous apparaît seulement sous les œuvres qui en naquirent. Les chefs-d’œuvre qui enlèvent entièrement à la réalité coutumière, Beethoven seul les a créés. Il méritait d’être compris par un petit nombre, un petit nombre à lui dédiant leurs âmes, très humblement.

Aujourd’hui, sa gloire est plus splendide. Les professeurs de piano recommandent quelques-unes de ses sonates, — en raison de leur caractère inoffensif — aux jeunes demoisellesqui leur sont confiées. Les critiques autorisés aiment à lui rendre justice, le nomment le père de la symphonie. Le grand public, grâce à des auditions répétées de la Sym-