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LA RELIGION DE L’AMOUR ET DE LA BEAUTÉ

chant offre aux montagnes des fêtes triomphales, et ces soirs d’été ! Riante et belle en toute saison, c’est l’été surtout que j’aime la Provence. La chaleur, aux heures les plus chaudes, n’y est point si vive qu’on ne puisse s’en accommoder ; et à quelques heures des villes, pour peu qu’on avance dans la montagne, l’air est plus frais que dans nos pays. Et cependant la nature, les plaines, les bois, la mer, le ciel, tout déborde de lumière et de vie.

Bienheureuse terre de Provence, tous les enfants l’aiment, tous les sages aussi ; et notamment ces hommes à la fois sages et enfants que l’Église a choisis pour ses saints. Il n’y a pas un village d’Avignon à Nice, qui ne garde le souvenir de quelque bon saint venu là des pays étranges, pour prêcher l’Évangile, pour faire des miracles, et pour prendre sa part des fêtes du soleil. Les premiers, les meilleurs, c’est en Provence qu’ils se sont sentis le plus près de Dieu. Je ne parle pas seulement des saintes Maries et de Lazare, et de l’aveugle des Évangiles que l’Église honore sous le nom provençal de saint Restitut. Mais saint Honorât et sa petite sœur sainte Marguerite, les solitaires des îles de Lérins, et saint Maximin, et saint Rémy, et saint Trophime, ils arrivaient tous de régions lointaines, poussés par un même désir d’adorer le Créateur dans le plus magnifique des lieux qu’il avait créés. Saint François, en vérité, n’est point venu en Provence ; du moins, il n’a pas trouvé le loisir d’y venir corporellement ; mais, il y avait toute son âme. On sait que, Provençal par sa mère, il préférait à toutes les chansons d’Italie les claires