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NOS MAÎTRES

siècle. Évidemment, cette pauvre science, acharnée à expliquer l’impossibilité éternelle de faits maintenant constatés, elle était l’erreur d’une fausse piste : on allait liquider ses restes et procéder à l’installation d’un nouveau reflet de l’immuable nature. Je regrettai seulement le décès de ma nourrice : comme son concours eût été précieux à cette science naissante ! Et puis je me rappelai

— car toutes raisons me semblaient bonnes pour fortifier un peu ces lois en détresse — que les auteurs des volumes lus avant celui-là expliquaient les phénomènes de cette suggestion par un fait entièrement légal et autorisé. Les personnes magnétisées, disaient-ils, ne devinent pas une pensée directement, mais leurs sens sont à ce point affinés, et leur attention concentrée, et leur intelligence excitée, qu’elles aperçoivent sur le visage des gens qui les entourent tous les mouvements passagers, les mille insignifiants changements, qui, à leur sensibilité d’exception, indiquent — comme feraient des mots — les pensées. Ainsi une magnétisée n’a pas besoin de paroles pour comprendre ce que je veux ; ma pensée occasionne des contractions de mes muscles faciaux, et la magnétisée devine mes idées en voyant ces signes extérieurs. L’argument me paraissait bien un peu suspect, mais pour sauver la science il n’y a rien que je n’eusse admis.

Je continuai de lire le livre de M. Ochorowicz. J’appris que l’on pouvait ordonner mentalement des actes à des personnes éloignées de plusieurs kilomètres, et que, par exemple, on avait attiré à