Page:Wyzewa - Nos maîtres, 1895.djvu/292

Cette page n’a pas encore été corrigée
280
NOS MAÎTRES

quelque distance, il fallait émettre des sons et encore d’une distance très faible, et à la condition que les ondes sonores ne fussent pas interceptées ; que les esprits des morts ne se montraient pas aux prisonniers, parce que les morts n’avaient point d’esprit, et aussi parce que les cloisons ne laissaientpoint passer des apparences matérielles. Quant à l’arrêt des bras, effectué sur un autre homme par la seule volonté, c’était une plaisanterie quelque peu outrageante : un organisme ne pouvant agir sur un autre sans des échanges de mouvements. Et la transformation, par un vouloir étranger, du subtil prince en quelque pope pleurnicheur, c’était, je le vis bien, le comble de l’insanité : des millions de volumes scientifiques se seraient soulevés de leurs bibliothèques, pour écraser le fou capable d’une pareille pensée.


Le jour anniversaire d’un trépas regretté n’avait pas été vain : j’avais acquis la preuve de l’absurdité de ma première éducatrice, et j’avais enfin connu cette précieuse chose, si justement appréciée, la science. Je revenais chez moi, lorsque, passant devant un libraire, j’eus l’idée d’acheter aussitôt quelques ouvrages scientifiques, et d’apprendre ainsi les dernières lois de l’univers.

Un aimable commis que je consultai m’offrit, avec maintes recommandations, ce qu’il y avait de plus sérieux et de plus nouveau : j’étais ravi de ma matinée.

Je lus d’abord le Magnétisme animal de MM. Binet et Féré, et la Suggestion de M. Bernheim. Ce