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NOS MAÎTRES

apparaît si charmante, pour ce mystérieux et délicieux mélange de la pureté ancienne et de notre sensibilité moderne.

Seul parmi nous, M. France était homme à mettre en beau langage la vanité de l’intelligence et l’inutilité de la science. Et c’est vraiment ce qu’il a toujours fait, depuis ses premiers contes, où déjà il promenait sur toutes les choses de la pensée un regard ironique et désabusé, jusqu’à ce Lys rouge, son dernier roman, qui est en quelque sorte le poème de l’amour sensuel, la glorification de la chair aux dépens de l’esprit. Et c’est encore la même philosophie qu’il nous présente dans son Jardin d’Épicure, admirable jardin où il a réuni la plus délicate floraison de ses rêves de poète et de philosophe ; jardin, ou plutôt bouquet, car ce sont des fleurs qu’il a cueillies pour nous dans toute une suite d’articles anciens. De ces articles, que sans doute il ne daigne pas publier en volume, il a extrait seulement ce qui s’élevait au-dessus de l’actualité passagère : et ainsi il nous a donné un petit livre exquis et parfait, un délicieux manuel de la consolation intérieure.


Nous tenons désormais, en ces trois cents pages, toute la philosophie de M. France. Et nous pouvons mesurer, plus exactement que nous n’avons fait jusqu’ici, la part d’influence qui revient à ce maître dans le mouvement qui nous porte aujourd’hui, les uns et les autres, à nous défier de la