Page:Wyzewa - Nos maîtres, 1895.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
9
L’ART WAGNÉRIEN

philosophique radieux. Cette ascension fut-elle par lui nettement perçue ? Et l’explication que j’en ai tentée, l’eût-il approuvée ? Cela n’importe, en vérité. Et si Wagner a cru, plus modeste que son maître, reprendre seulement la doctrine de Schopenhauer. qui de nous le pourra hlàmer d’avoir ainsi mal compris la doctrine des Parerga ?

Il nous a dit, le révélateur, il a dit la réalité des choses. Si les personnages de ses drames sont des souffrants, c’est qu’il était aussi le contemporainde nos pessimismes : mais il a joyeusement créé pour nous un mode nouveau de l’émotion artistique. Et. par-dessus son œuvre, il nous a légué sa doctrine. Il nous a offert le moyen de réaliser le suprême bonheur par la compassion, si nous restons fidèles à l’apparence habituelle ; et, si nous y renonçons, par l’apparence supérieure de la création artistique.

En 1830, lorsque Chopin, et Berlioz, et Hugo, clamaient la douleur de vivre et la vanité d’agir, un homme venu d’ailleurs. Stendhal, offrit aux âmes la salutaire vérité de son optimisme. Il montra les plaisirs de l’énergie, de la résistance à la nature, de l’orgueilleuse recréation de soi-même. Ainsi Wagner, aujourd’hui, dans cette inclinaison au pessimisme de tous les esprits différents, nous apporte le Saint Graal précieux de sa consolante doctrine. Il nous engage à reprendre, sans cesse, activement, l’œuvre de création intérieure qui est