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NOS MAÎTRES

formules d’expression. Ils aperçoivent que le scepticisme, en ces écrits, est purement extérieur, résultant de certains procédés spéciaux, dont M. Renan, incessamment, fait emploi, et souvent abus.

Et ce scepticisme nous devient suspect. Nous devinons que, prêtre élégant et qui serait fâché de sembler trop crédule, philosophe ami des éditions multiples, astreint, par des considérations de renommée acquise, de librairie, et de gloire, à être pris pour sceptique, M. Renan s’est, pour longtemps, donné le moyen de paraître tel, quoi qu’il pense et affirme. De quels merveilleux artifices était faite, avant qu’il en abusât, l’ironie de cet enchanteur ! Adorables phrases, légères et limpides, où les plus dogmatiques assertions étaient accompagnées seulement d’un signe interrogatif, du mot « sans doute », ou « peut-être », d’un sourire malicieux, d’un haussement d’épaules ! Le tour était joué ; nous admirions un homme capable de pensées si belles, et de ne les point croire ; mais nous avions entendu les pensées, et le tour était joué.

Or si, ayant constaté ces artifices, nous les dépassons, les affirmations de M. Renan apparaissent nettes et constantes. Depuis la Lettre à M. Berthielot, écrite en 1863, jusqu’au Prêtre de Némi, nous retrouvons la même doctrine, établie souvent par des mots pareils. Et M. Renan se manifeste à nous un philosophe très dogmatique, un croyant, d’invariable et naïve foi ; l’auteur encore du système le plus homogène que, depuis Hegel et Spencer, nous ayons connu. Breton, il sourit, à la manière de