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Mais, hélas ! ce n’est qu’un roman. Et tout autre nous apparaît l’histoire véritable des relations de Nietzsche et de Richard Wagner, telle qu’elle ressort des faits et documents divers cités dans ce livre même. C’est une histoire beaucoup moins poétique, mais en revanche beaucoup plus humaine; le jeune disciple de l’auteur de Zarathustra l’aurait plus aisément comprise. Elle ne laisse pas non plus d’être assez touchante dans sa vérité, et le romancier qui voudrait le prendre pour thème y trouverait encore, à ce qu’il me semble, l’occasion d’analyse ’subtiles et de vivantes peintures. Ai-je besoin d’ajouter que, pour la mémoire de Nietzsche comme pour celle de Wagner, elle n’a rien, au total, que de fort honorable ? Elle nous rappelle seulement que notre nature a des exigences où personne n’échappe, et qu’il n’y est pas jusqu’aux sur-hommes qui ne doivent porter leur part des petits travers et des petits ridicules de l’humanité.

La véritable histoire de cette amitié désormais fameuse, et dont Mme Fœrster dit avec raison qu’elle a été à la fois « le bonheur et la tragédie » de la jeunesse de son frère, c’est surtout l’histoire d’un malentendu réciproque, devenant plus profond et plus pénible d’année en année. Aucun des deux amis ne s’est rendu compte une seule fois de ce qu’était l’autre, ni de ce qu’il