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lante, tant nous avons de plaisir à nous perdre en elle. Telle est du moins l’impression qu’elle me donne. Une sonate de Beethoven (pour ne point parler d’un opéra de Mozart ou de Fidelio) me produit un effet plus dramatique que les Maîtres Chanteurs. J’y sens plus de vraie vie, une passion plus profonde. Mais il n’y a pas un recoin de mes nerfs qui ne vibre dès les premières notes des Maîtres Chanteurs ; et pas un moment, jusqu’à la fin de la pièce, je n’ai le loisir de me demander ce que souffre Hans Sachs, ni quelle est la véritable formule de l’idéal artistique. Mythe, symbole, action, tout disparaît dans cet océan de douceur et de volupté. Et ce n’est point assurément ce qu’a voulu Wagner. Mais pourquoi avait-il tant de musique en lui, et de cette musique maligne, qui ôte la raison à quiconque l’écoute ?

1894