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passage ; il réussit à l’écarter et entendit des sanglots ; ils éclataient tout près de lui, comme s’ils eussent été poussés par l’être qu’il ne voyait pas et qu’il touchait cependant.

Le jour suivant, la température était étouffante ; vers le soir, de gros nuages livides s’amoncelèrent dans le ciel.

À cinq heures, il faisait presque nuit. Le précepteur avait plié son album et regardait la momie, songeant à l’étrange impression qu’il en recevait. Tout à coup l’orage éclata et un éclair brillant illumina la galerie sombre.

À la lueur de l’éclair, Rogers vit distinctement la momie ouvrir les yeux, et il perçut un murmure de voix, pareil au bruit que ferait une personne parlant très bas. Il ne reconnut aucun mot ; le langage d’ailleurs lui parut incompréhensible.

Sérieusement effrayé, soit par le phénomène lui-même, soit par sa coïncidence avec l’orage qui fut épouvantable, Rogers résolut de ne plus travailler auprès de la momie, craignant de tomber malade ou de perdre l’esprit. Il se confina dans la bibliothèque. Les choses ne s’améliorèrent pas pour cela ; dès que le soir venait, il entendait le soupir accoutumé, puis le murmure indistinct.

À différentes reprises, on l’appela ; son nom était prononcé maladroitement et sonnait comme « Rhô Thchèr Ssè ». Chaque fois qu’il avait cette sensation, le précepteur levait la tête ; il ne voyait que le bibliothécaire, régulièrement absorbé dans une lecture et paraissant complètement insensible au bizarre phénomène.

Rogers un jour s’enhardit jusqu’à lui demander s’il n’entendait rien, car l’appel avait été proféré à haute voix ; le vieux Johnston secoua négativement la tête ; d’ailleurs il était sourd.

Les hallucinations auditives du précepteur devenaient chaque jour plus fortes et plus précises. Maintenant il distinguait des mots ; il reconnut son nom accolé à un autre composé de trois syllabes, que les lettres Ne-ffertt-thi ou Nefertzi rendent assez bien.

Il est remarquable de constater que pendant toute la durée des hallucinations du précepteur, les phénomènes affectèrent un caractère bénin. On entendait des pas, de la musique, on voyait quelquefois la galerie illuminée, plus rarement on apercevait des formes blanches dans les corridors, ou bien l’on était frôlé par des promeneurs in-