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L’idée de la réincarnation était familière à la jeune fille ; cette idée forme la substance de toutes les sectes mystiques contemporaines, sur le continent tout au moins, et il faut reconnaître qu’elle s’accommode à merveille des théories scientifiques actuelles.

Mlle Roberty n’ajoutait aucune foi à ces créations de sa fantaisie, mais elle s’en amusait comme d’un joli rêve et elle se plaisait à broder mille arabesques sur cette trame subtile.

Elle avait été princesse, ou grande dame, elle avait vu les splendeurs évanouies du Temple, contemplé la pompe des cérémonies religieuses, parcouru les routes du nôme réservé au soleil, goûté la fraîcheur des nuits sur les terrasses de son palais.

Un jour, elle fut amenée à faire à Rogers la confidence des caprices de son imagination.

Elle avait réussi à trier un certain nombre de fragments de terre émaillée et à reconstituer le motif qu’ils formaient : une oie sauvage prenant son vol au milieu des roseaux. Le dessin était incomplet, mais il se voyait avec une netteté suffisante.

Rogers complimenta Magda quand elle lui montra son œuvre.

— Vous avez joué au puzzle, lui dit-il, et vous avez eu d’autant plus de mérite à refaire votre dessin que vous n’aviez aucun modèle.

— J’en avais un.

L’Anglais fixa son œil clair sur sa compagne.

— Un modèle ? Vous avez donc trouvé un fragment complet ?

— Non.

— Alors ?

— Je me suis imaginé que je connaissais ce dessin pour l’avoir vu autrefois dans sa fraîcheur : un pavement de stuc peint, avec de l’eau et des poissons au milieu, et comme bordure des oies sauvages s’envolant.