Page:Wylm - L'Amant de la momie, paru dans Le Matin, 24-10-1912 au 06-12-1912.djvu/168

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Quoiqu’elle ne fût qu’une ombre, Nefert-thi frappa du pied avec impatience.

— Je ne veux pas que tu ailles retrouver cette petite étrangère, qui s’imagine avoir des droits sur toi.

Rogers était fort ennuyé de l’exigence imprévue de la momie. Il ne pouvait, sans offenser sa mère, son oncle Amos, sa tante Jacinthe et sa cousine Effie refuser le dîner de famille donné en son honneur. Il essaya de persuader l’Égyptienne.

— Chère Nefert-thi, je t’en supplie, laisse-moi accomplir ce devoir. Je le jure, tu m’entends, je te jure que je n’aime que toi !

Il s’agenouilla gentiment devant la jolie païenne, mais il ne la toucha pas, sachant très bien qu’il la réduirait aussitôt en vapeur invisible.

Nefert-thi eut alors recours à un moyen généralement irrésistible ; elle leva ses beaux yeux sur Rogers, et le jeune amoureux s’aperçut que des gouttelettes claires comme des perles de cristal se suspendaient aux longs cils de soie.

— Ne pleure pas, ma bien-aimée ; tes larmes me font mal.

— C’est que je ne suis qu’une ombre impalpable, Améni ! Je sens mon infériorité à ce point de vue. La jeune barbare est vivante, sa chair est gonflée de sang rouge et sa peau blanche se tend sans rides sur ses os.

» Tandis que moi je suis moins que le zéphyr qui courbe les tiges de lotus !

— Mais puisque je n’aime que toi !

— Sans doute, tu m’aimes, Améni ; mais comment résisteras-tu aux caresses de cette fille, puisque je ne puis offrir à tes lèvres qu’un simulacre de lèvres, alors qu’elle te présentera la fraîcheur réelle de sa bouche ? Ah ! si j’avais eu le temps de reprendre mon corps vivant et jeune, ma beauté ne craindrait pas la sienne !

— Tu es pour moi la seule femme désirée !

Nefert-thi sécha ses larmes, un joli sou-