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me les autres, mais la monnaie qui sert à le payer n’est ni l’or, ni l’argent, ni le blé, ni l’herbe, ni le vin, ni les pierres précieuses. Ce sont nos larmes, les tourments de nos cœurs et de nos âmes qui l’achètent, et le prix est souvent supérieur à la marchandise. Mais le bonheur est une chose si précieuse qu’il ne faut jamais regretter ce qu’il nous a coûté.

Ces réflexions philosophiques me sont inspirées par l’intervention de la vénérable Mrs. Rogers, sœur du Rév. Amos-Dermott. Elle ne pouvait pas être insensible à la fervente ardeur spirituelle de son frère. Elle avait une absolue confiance dans le jugement de cet ecclésiastique, et ne voyait que par ses yeux.

Aussi fut-elle navrée quand elle apprit l’histoire lamentable de son fils Edward. L’infortunée Mrs. Rogers eut une telle émotion qu’elle dut absorber trois verres d’eau sucrée avec de l’essence de fleurs d’oranger, avant de reprendre ses sens.

— Il faut user de votre autorité maternelle, ma sœur, afin de ramener à Dieu cette brebis égarée.

— Oui, mon frère, je verrai Edward et je lui parlerai comme il sied à une mère.

En effet, Rogers fut sévèrement reçu quand il se présenta chez sa mère.

— Qu’ai-je appris, mon cher fils ? Votre oncle, le saint et révérend ministre de Dieu Amos Dermott, m’a raconté la scène horrible à laquelle vous l’avez fait assister, scène dans laquelle cette pauvre fleur, Effie, a failli être détruite par l’haleine fétide du malin Esprit !

— Mais, ma mère, ils m’ont traité comme un fou !

— J’aimerais mieux, mon fils, vous voir dans cent cellules, à Bedlam que de vous savoir la proie de Satan ! Et vous vous acoquinez avec l’esprit impur d’une momie ! d’une païenne ! je vous en conjure, renoncez à Satan, à ses pompes, à ses œuvres, et redevenez un fidèle chrétien.