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son de ces hypothèses avec nos propositions précédentes. Dans le grand nombre des satellites qui éclairent les planètes des cercles les plus éloignés, dans la rapidité de la rotation de ces planètes et dans la nature même de leurs matériaux constitutifs appropriés à l’action d’un Soleil lointain, nous avons reconnu des preuves de la Sagesse divine, qui a tout ordonné en vue des avantages des êtres raisonnables qui les habitent. Mais comment accorder maintenant cela avec l’hypothèse d’une théorie purement mécanique ? Comment croire que l’exécution des desseins de la Sagesse suprême a pu être abandonnée à la matière brute, et que la nature laissée à elle-même a pu réaliser les vues de la Providence ? Reconnaître l’admirable ordonnance de la structure du monde, n’est-ce pas avouer qu’elle n’a pu se développer par la seule action des lois générales de la Nature ?

Ce doute est bientôt dissipé, dès que l’on se reporte à ce que j’ai dit précédemment sur la même question. Est-ce que la Mécanique des mouvements naturels ne doit pas nécessairement tendre à rester, dans toute l’étendue des combinaisons qu’elle engendre, en parfait accord avec les desseins de la suprême Raison ? Comment pourrait-elle se livrer dans ses entreprises à des efforts désordonnés, à une divagation sans frein, lorsque toutes ses propriétés, desquelles ressortent ces effets, ont leur détermination même dans l’idée éternelle de l’Intelligence divine, qui les a nécessairement coordonnées et harmonisées les unes avec les autres ? Si l’on y réfléchit bien, comment pourrait-on justifier l’opinion qui regarderait la Nature comme un serviteur contrariant, qu’un frein peut seul retenir dans la voie de l’ordre et de l’harmonie générale et l’empêcher de se livrer à ses caprices, à moins d’admettre qu’elle est un principe se suffisant à lui-même, dont les propriétés ne reconnaissent aucune cause, et que Dieu, aussi bien que faire se peut, s’efforce de brider pour le faire obéir à ses desseins éternels ? Mieux on apprend à connaître la Nature et plus on voit que les propriétés générales des choses ne sont point isolées ni étrangères les unes aux autres. On se convainc bien vite qu’elles ont les unes avec les autres des affinités essentielles, en vertu desquelles elles se prêtent spontanément un mutuel secours pour contribuer à la création d’un ensemble parfait, où les éléments par leur étroite dépendance concourent à la beauté du monde matériel et au bien-