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reçoivent du Soleil une influence plus faible. Nous savons en effet que l’action de la lumière et de la chaleur dépend non seulement de son intensité absolue, mais aussi de l’aptitude de la matière à la recevoir, et à s’opposer plus ou moins à son excitation ; par suite le Soleil, à la même distance à laquelle pour une matière d’espèce grossière il déterminerait un climat tempéré, agissant sur des fluides plus subtils, les volatiliserait et produirait sur eux une action nuisible ; d’où il faut conclure que la matière plus légère et plus mobile dont sont formés Jupiter et Saturne n’a d’autre but que de faire de leur éloignement du Soleil une condition de leur bien-être.

Enfin il est à croire que l’excellence des êtres qui peuplent ces régions supérieures du ciel a pour conséquence physique une plus longue durée de leur existence. La destruction et la mort ne peuvent pas avoir prise sur ces créatures d’ordre élevé autant que sur notre nature inférieure. L’inertie de la matière et la grossièreté de l’élément, qui sont le principe spécifique de l’infériorité chez les êtres du degré le plus bas, est aussi la cause déterminante de leur tendance vers la destruction. Lorsque les humeurs, qui nourrissent et font croître l’animal ou l’homme en s’incorporant entre ses fibres et en s’unissant à sa masse, deviennent incapables d’élargir et de dilater les canaux et les vaisseaux dans lesquels elles circulent, lorsque la croissance est terminée, alors ces sèves nourricières, en s’attachant aux parois par un mécanisme identique à celui qui est employé pour nourrir l’animal, rétrécissent et bouchent les cavités des vaisseaux, et détruisent l’organisation de toute la machine, par une solidification progressivement croissante. Il est à croire que les créatures plus parfaites qui habitent les planètes éloignées, bien que soumises comme les autres au dépérissement et à la mort, trouvent dans la finesse de leurs tissus, dans l’élasticité de leurs vaisseaux, dans la légèreté et l’activité de leurs humeurs, une force de résistance qui retarde beaucoup chez elles la décrépitude, triste apanage de l’inertie des créatures plus grossières, et jouissent d’une existence dont la durée est en rapport avec leur degré de perfection, de même que la brièveté de la vie de l’homme est une conséquence directe de son infériorité.

Je ne puis abandonner ces considérations sans aller au-devant d’un doute qui pourrait surgir très naturellement de la comparai-