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dans la Note VII de son Exposition du Système du monde. Plus récemment, un mathématicien anglais, M. G. Darwin, a présenté à la Société royale une série de Mémoires sur les marées produites dans un corps visqueux par l’action d’un ou plusieurs corps extérieurs. Une des conséquences de ses recherches le conduit à émettre l’hypothèse qu’une planète peut donner naissance à un satellite par la séparation d’une portion de la protubérance équatoriale, satellite qui s’éloignerait ensuite progressivement de la planète mère, à mesure du ralentissement de la rotation, dû à la réaction des marées, et finirait par atteindre une position d’équilibre. Bien que cette conception ne paraisse pas pouvoir être étendue à l’explication de l’origine des planètes elles-mêmes, elle peut jouer un rôle important dans les développements d’une hypothèse cosmogonique plus générale, parce qu’elle peut être appelée à expliquer certaines anomalies qui, dans la réalité, troublent l’harmonie générale des mouvements sur laquelle repose toute hypothèse.

En effet, il ne faut pas oublier que les orbites de certaines planètes, comme Mercure, Pallas, ont des inclinaisons très fortes sur le plan de l’équateur solaire ; que les équateurs de plusieurs grosses planètes font des angles souvent considérables avec les plans des orbites ; qu’enfin certains satellites ont leurs orbites très fortement inclinées sur le plan de l’orbite de la planète. Il semble impossible qu’une même cause originelle, agissant dans sa simplicité primitive, puisse rendre compte de ces anomalies : le système planétaire, né suivant une hypothèse quelconque, présente forcément à l’origine une harmonie de mouvements presque parfaite. C’est par l’action de perturbations ultérieures qu’on pourra expliquer les déviations réelles ; et le développement d’une hypothèse ne sera complet que lorsqu’elle sera arrivée à rendre compte de ces anomalies d’une manière mathématique, ou tout au moins à en montrer la possibilité. Mais, en attendant ce couronnement final, il ne me paraîtrait pas sage de faire de ces cas exceptionnels une objection renversante contre une hypothèse, attendu que toutes y sont nécessairement sujettes.