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plus grande élasticité et une plus grande vivacité de mouvements, ces cinq heures leur seront autant et plus que ne sont nos douze heures de jour pour la nature inférieure de l’homme. Le besoin du temps est quelque chose de relatif, qui ne peut être connu et compris autrement que par la comparaison de la grandeur de l’acte à exécuter avec la rapidité de l’action. Ainsi la même durée qui n’est qu’un instant pour une espèce de créatures peut être pour une autre une longue période pendant laquelle se développent toute une série de changements, en raison de son exubérance d’activité. Saturne, d’après le calcul très vraisemblable de sa durée de rotation que nous avons exposé précédemment, voit encore plus rapidement le jour succéder à la nuit, et nous devons par suite supposer à ses habitants des facultés encore plus merveilleuses.

D’autres remarques viennent encore confirmer la loi que nous avons énoncée. La nature a évidemment prodigué ses richesses sur la partie du monde la plus éloignée. Les lunes, qui font bénéficier les actifs habitants de ces régions fortunées d’un prolongement de la lumière du jour et remplacent le Soleil absent, sont en plus grand nombre autour de ces planètes. La nature semble avoir pris soin de venir sans cesse en aide à leur activité, de façon qu’à aucun moment rien ne les empêche de la mettre en œuvre. Les quatre satellites de Jupiter lui constituent un avantage évident sur toutes les planètes inférieures, et Saturne est encore plus favorisé que lui ; le bel anneau qui l’entoure et contribue à son illumination est l’indice très vraisemblable de l’excellence de ce beau séjour. Tandis qu’au contraire les planètes inférieures, pour lesquelles un pareil supplément de lumière resterait sans utilité, dont les habitants se rapprochent bien plus des êtres dépourvus de raison, n’ont qu’un seul satellite ou n’en ont pas du tout.

Je dois ici aller au-devant d’une objection qui pourrait réduire à néant les effets des heureuses concordances que je viens de signaler. Il ne faudrait pas regarder la grande distance qui sépare certaines planètes du Soleil, source de lumière et de vie, comme un mal contre lequel l’ensemble des dispositions que nous venons de reconnaître est destiné à lutter en aidant en quelque sorte à l’action de cet astre, ni croire qu’en réalité les planètes supérieures occupent dans le monde une position moins favorisée, une place désavantageuse à la perfection de leurs habitants, parce qu’elles