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clarté, produisent des excitations bien plus vives que les séductions des sens, que l’âme alors domine et foule aux pieds victorieusement. Avec quelle majesté la Divinité elle-même, qui se peint dans toutes les créatures, ne se peindra-t-elle pas dans ces créatures pensantes, qui, comme un lac que ne troublent pas les tempêtes des passions, reçoivent et réfléchissent tranquillement son image ! Je ne veux pas poursuivre ces imaginations au delà des limites assignées à un travail purement scientifique ; je me borne à résumer en un seul énoncé les deux lois auxquelles nous sommes arrivés : la perfection du monde spirituel, aussi bien que celle du monde matériel dans les planètes, croît et progresse en proportion de la distance au Soleil, de Mercure jusqu’à Saturne et peut-être au delà, aussi loin qu’il existe des planètes.

Cette loi, qui se présente d’abord comme une conséquence naturelle de la relation physique de chaque centre d’habitation avec le centre du monde, et s’appuie sur des motifs de haute convenance, reçoit une véritable démonstration et devient une vérité presque irréfutable, si l’on considère les conditions réelles des planètes supérieures et leur complète appropriation à l’existence de créatures parfaites. La succession rapide des périodes du temps sur ces sphères suppose à leurs habitants une vivacité et une promptitude d’action qui ne peuvent être l’apanage que de créatures d’ordre supérieur, tandis qu’elle s’accorderait mal avec la lenteur de créatures inertes et imparfaites.

La lunette nous apprend en effet que la succession du jour et de la nuit sur Jupiter se fait dans l’intervalle de dix heures. Que deviendrait en présence d’une pareille distribution du temps un habitant de la Terre transporté sur cette planète ? Les dix heures du jour entier lui suffiraient à peine pour le sommeil dont sa grossière machine a besoin pour se refaire. Combien de temps lui resterait-il pour les occupations de la vie active, après qu’il aurait pris sur la journée les heures nécessaires pour se vêtir et se nourrir ? Comment une créature, dont les actes se font avec tant de lenteur, trouverait-elle le moyen de se livrer à une occupation suivie, d’entreprendre quelque grande œuvre, lorsqu’au bout de cinq heures elle verrait son travail brusquement interrompu par une nuit de même durée ? Qu’au contraire Jupiter soit habité par des créatures parfaites, dont le corps plus délicatement conformé possède une