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devrait tourner plus vite que Jupiter ; car la même force motrice imprime un mouvement plus rapide à un petit corps qu’à un gros ; et surtout on s’étonnerait à bon droit de voir, quand tous les mouvements se ralentissent à mesure que la distance augmente, la vitesse de rotation croître au contraire avec cette distance, et atteindre pour Jupiter une valeur deux fois et demie plus grande que celle de son mouvement annuel.

Cette nécessité de reconnaître, dans la rotation diurne des planètes, la même cause qui est la source de tous les mouvements naturels, l’attraction, me paraît apporter un témoignage considérable en faveur de l’exactitude de notre théorie qui, d’un principe fondamental unique, fait découler si aisément l’explication des faits particuliers.

Mais si la rotation d’un corps résulte de son mode de formation même, toutes les sphères de l’univers doivent tourner sur elles-mêmes. Pourquoi la Lune ne tourne-t-elle pas ? Car si elle semble tourner en ce sens qu’elle présente toujours la même face à la Terre, cette rotation apparente n’est, pour plusieurs astronomes, que l’effet d’un défaut d’équilibre entre ses deux hémisphères. Ne pourrait-elle pas avoir autrefois tourné beaucoup plus vite autour de son axe, puis je ne sais quelles causes seraient intervenues, qui auraient réduit peu à peu son mouvement à ce faible reste que nous percevons aujourd’hui ! Si l’on peut résoudre ce problème pour une seule des planètes, l’application s’en fera d’elle-même à toutes les autres. Je réserve cette solution pour une autre occasion, parce que le problème a une connexion étroite avec celui que l’Académie des Sciences de Berlin a proposé comme sujet de prix pour 1754[1].

La théorie qui explique la rotation des planètes, doit pouvoir

  1. Kant a traité cette question de la variabilité du mouvement de rotation de la Terre dans une note de quelques pages intitulée : Untersuchung der Frage ob die Erde in ihrer Umdrehung um die Achse… einige Veränderung erlitten habe, 1754 (t. VI de l’édition de Rosenkranz et Schubert, p. 3. — T. I de l’édition de Hartenstein, p. 179). C’est dans cette note que se trouve énoncée pour la première fois, que je sache, la solution d’un problème qui a pris dans ces derniers temps une très grande importance. Kant arrive en effet à cette conclusion, que le mouvement des marées produites par les actions du Soleil et de la Lune a nécessairement pour conséquence un ralentissement progressif de la rotation de la Terre.