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nombres. La sagesse, la bonté, la puissance qui s’y sont manifestées sont infinies, et elles s’y montrent au même degré actives et fécondes ; le plan de leur manifestation doit donc être comme elles infini et sans bornes.

Mais ce n’est pas seulement dans le système général du monde qu’il y a à faire des découvertes qui étendront la conception que nous pouvons nous former de la grandeur de la création. Bien des détails sont encore inconnus, même dans notre petit monde solaire ; nous en voyons les membres séparés les uns des autres par des intervalles énormes, et nous ne savons pas ce qui existe dans ces intervalles. Entre Saturne, la plus extérieure des planètes que nous connaissons, et la comète la moins excentrique qui s’enfonce dans le ciel à des distances dix fois plus grandes, ne peut-il y avoir quelque planète dont le mouvement ressemblerait encore plus que celui de Saturne au mouvement des comètes ? Et s’il en existait d’autres encore, ne verrait-on pas dans la série de ces astres intermédiaires, par une transformation progressive de leurs caractères, les planètes dégénérer en comètes et les deux espèces d’astres se réunir en une seule ?

La loi d’après laquelle les excentricités des orbites planétaires sont en rapport avec leurs distances au Soleil vient à l’appui de cette supposition. L’excentricité des mouvements des planètes augmente avec leurs distances au Soleil, et par suite les planètes les plus éloignées se rapprochent du caractère des comètes. Il y a donc lieu de penser qu’il peut y avoir encore d’autres planètes au delà de Saturne, qui sont encore plus excentriques que lui, et qu’ainsi, par une série continue, les planètes finissent par se transformer en comètes. L’excentricité est pour Vénus 1/126 du demi-axe de son orbite elliptique ; pour la Terre 1/58 ; pour Jupiter 1/28, et pour Saturne 1/11 ; elle croît donc visiblement en même temps que la distance. Il est vrai que Mercure et Mars font exception à cette loi, leur excentricité est beaucoup plus grande que ne le voudrait leur distance au Soleil. Mais nous verrons dans la suite que la même cause, qui a donné à quelques planètes une masse moindre que celle qu’elles devraient avoir, a produit en même temps une diminution de la force d’impulsion qui aurait déterminé une orbite circulaire, et en a ainsi augmenté l’excentricité : une même cause explique à la fois ce qui manque à ces planètes en masse et en vitesse.