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du roi Alexandre et de la reine Draga Maschin. Au moment où la guerre éclata, en 1914, elle sortait à peine d’une lutte de quinze années avec l’Autriche.

Le soir, nous entrons dans Belgrade, la capitale ; nous y resterons jusqu’à demain, grâce au retard causé par le changement d’horaire de notre train express, changement qui est loin d’améliorer notre sort.

Située au confluent du bleu Danube et de la Save, Belgrade occupe, avec ses quatre-vingt-cinq mille habitants, une position unique sur un promontoire dominant les deux fleuves qui se marient à ses pieds. Cette ancienne colonie romaine subit tour à tour le joug des Grecs et des Turcs dont elle fut délivrée par Karageorge qui, en 1809, fut investi du pouvoir suprême. En 1813, les Turcs s’emparèrent de nouveau de la Serbie, dont ils furent, en 1815, chassés définitivement par Milos Obrenovitch. Depuis, les Karageorge et les Obrenovitch se sont disputé le trône. L’assassinat du roi Alexandre et de la reine Draga, le 29 mai 1893, fit disparaître le dernier Obrenovitch et mit fin à la querelle. Le roi Pierre Karageorge monta sur le trône.

Il était à Genève lors du coup de main. Rentré à Belgrade, il fit, des assassins d’Alexandre, ses ministres. Voilà pourquoi l’histoire enregistrera, à tort ou à raison, qu’Alexandre et Draga furent bel et bien les victimes de Pierre. L’aîné de ses fils, le prince Georges, se soucie fort peu des honneurs royaux qui lui reviennent par droit d’aînesse. Il préfère jouir de la liberté absolue et faire la bombe, il la fait princièrement, dit-on.

Pierre naquit à Belgrade en 1846, et fit ses études militaires en France, à l’école de Saint-Cyr. Il souffre de pleurésie et l’on ne croit pas que ses jours se prolongent beaucoup, vu les infirmités de son grand âge et le triste état général de sa santé, affectée par les fatigues et les blessures de trois guerres. En 1917, il abandonna les rênes du pouvoir à son second fils, Alexandre. Dans son manifeste à son peuple, on relève cette déclaration émue : « Ma bien-aimée Serbie est maintenant libre et son avenir,