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somptueusement décorée que se trouvait le Trône des Paons, maintenant à la Cour du roi de Perse, à Téhéran. Sous Louis XIV, Tavernier, le grand voyageur français, passa par ici ; il vit ce trône qu’il estima alors à pas moins de cent cinquante millions de francs. Nadir-Shah, roi de Perse, convoita cette merveille. Voilà comment il se fait, qu’en 1739, le Trône des Paons prit le chemin de la capitale persane. Le guide nous indique sur l’architrave, entre deux pilastres, la fameuse inscription en caractères arabes :


« S’il existe un paradis sur terre,
« C’est ici, c’est ici, c’est ici. »


Les Anglais ont traduit :


« If on earth be an Eden of bliss,
« It is this, it is this, it is this. »


En toute franchise, je n’ai pas éprouvé en ce lieu le bonheur dont j’espère jouir en paradis, mais j’ai trouvé cela bien beau.

Passons maintenant dans les petits appartements du sérail ; marchons sur ses dalles fleuries de mosaïques précieuses sur lesquelles coulaient des flots de parfums délicats. Dans les niches brûlaient des encens et des essences qui excitaient aux plaisirs et invitaient aux douces ivresses. Au centre, sur une immense fleur de lotus en marbre blanc perforé de minuscules ouvertures, le grand Mogol s’égayait à lancer, sans les prévenir, des jets de parfums sur ses beautés favorites qui y dansaient. Leurs gestes de surprise et leurs cris de joyeuse alarme mettaient le comble à la félicité du souverain insatiable de jouissances. Admirons aussi la petite mosquée de marbre blanc finement ciselée ; le bain royal où se voit encore la table sur laquelle le royal baigneur se faisait masser par ses femmes. Ceci me rappelle ce refrain d’une des Chansons du soldat de Polin :


« Après avoir pris la douche froide,
« La cantinière viendrait nous essuyer. »


Un rêve de soldat, quoi !… qui vaut bien celui du grand Mogol !