abondante provision pour nous et les amis ! Mais… le bonheur n’est pas de ce monde ; il faut se contenter de peu. Continuons à parcourir cette fourmilière, cette ruche aux mille industries.
Ni chevaux, ni voitures, ni rickshas ne peuvent circuler dans ces étroits couloirs. Il fait bon : ni froid ni chaud ; dans les jours de chaleur, ce doit être infernal. Et le parfum qu’exhale ce cloaque ! Toute ma vie, j’aurai dans l’olfactum cet Houbigant sui generis.
À midi, nous débouchons sur le grand canal couvert de sampans. Un demi-million de Cantonois y vivent comme les canards dans les joncs. Nos trois porteurs — car il en faut trois pour chaque chaise — traversent le pont en escalier qui relie l’île des Légations à la terre ferme.
Le lunch pris, nous repartons pour le plaisir si nouveau de fouiller cette Babel ; c’est une véritable fascination. Nous y demeurons jusqu’au soir, alors que nous débouchons sur une clairière. Le gouvernement de la république du Dr Sun-Yat-San a entrepris de moderniser un quartier de la capitale de la Chine Nouvelle dont il est le président. Canton ne reconnaît pas l’autorité du gouvernement de Pékin ; la république de Canton a son gouvernement particulier ; elle a ses douanes, sa monnaie, sa police.
Nous visitons l’institution des Sœurs de l’Immaculée-Conception qui ont une maison à Outremont ; elles tiennent de grandes écoles, un hôpital, un refuge où elles reçoivent des enfants trouvés, des nouveau-nés ramassés un peu partout, chaque jour, comme dit la chanson :
« Sur un tas de pierre,
Sur un tas de bois,
Sur un tas de n’importe quoi ».
La cathédrale catholique, en granit rouge, est de style gothique pur. Du toit sortent des gargouilles à têtes de monstres et de chimères. Nous saluons Mgr de Guébriant, avec qui nous avons fait la traversée à bord du Shinyo Maru.