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garde-robes, et même jusqu’aux harnais de leurs montures. Vous y admirez les plus riches joyaux, auprès desquels pâliraient les pierreries de bien des cours d’Europe. Les brillants seuls qui ornaient la selle du cheval de l’impératrice rendraient jalouse une princesse. De petits vases de rien du tout, des boîtes grandes comme des pièces de cent sous, sont incrustés de diamants, de rubis, de saphirs. Il est impossible d’évaluer ces richesses. J’aurais voulu en avoir l’énumération, mais il n’existe aucun catalogue de ces trésors. Non, le faste des Grands Mogols, n’est pas une légende, ce n’est pas un mythe. Ce qu’en racontent les voyageurs de tous les pays, ce qu’en rapportent les historiens et même les romanciers les plus exagérés n’outrepasse pas la réalité. Souvent, en lisant les descriptions des fêtes données à la Cour du Grand Mogol, je souriais à la pensée que l’auteur avait lâché la bride à la folle du logis. Je suis revenu de mon erreur.

Le musée de peinture, par ailleurs, me laisse indifférent ; notons cependant de charmantes scènes de la vie chinoise brodées ou peintes sur soie. Quatre beaux gobelins ont l’air perdu au milieu de ces chinoiseries de vingt siècles. Ils sont sans doute allégoriques : aucune date, aucun titre, aucun catalogue, aucune étiquette, pas un guide chinois ou autre pour m’éclairer. Je me fais de l’histoire à moi-même. Je me dis que ces gobelins représentent la France, aux colonies d’Orient : Indo-Chine, Chine, probablement des cadeaux de la cour de France au Fils du ciel à l’époque du Grand Louis.

19 décembre — Messe à Saint-Michel de la légation française. Jolie nef, pauvre mais attrayante. Dans l’après-midi nous allons à la cathédrale de Pei-Tang, intéressante par le siège des Boxeurs. Un boulet de canon a emporté la tête d’une énorme tortue en marbre. Les stations du chemin de croix sont trouées de balles.

20 décembre — Je l’ai vue, la Grande Muraille de Chine, le monstre, le Dragon. C’était au temps où les prophètes tenaient encore leurs plumes inspirées en regardant Bethléem et le Golgotha ; où les Mages n’avaient pas encore