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ASIE — JAPON — NAGOYA — SHIMONOSEKI

paon, de l’érable ; le sujet de la décoration donne son nom à la salle.

Un corridor conduit au Ko-Gosho, le petit palais, qui consiste en trois salles décorées par des artistes modernes. Il ne date que de 1854 ; l’ancien a été incendié. Les artistes ont, au moyen d’audacieuses bandes bleues et blanches, tenté de représenter des nuages. Il faut beaucoup d’imagination et de bonne volonté pour retracer le ciel dans ce badigeonnage qui a toutefois le mérite de n’être ni laid, ni disgracieux et de produire un effet d’agréable fraîcheur ; illusion heureuse et bien accueillie aux époques des grandes chaleurs. Les peintures extérieures du mur représentent les douze mois de l’année. Plus loin, le cabinet d’étude et des conférences qui donne sur un beau jardin, un étang, des petits ponts, des arbustes, des fleurs. Ce sont les seuls appartements ouverts au public ; le reste est fermé depuis que le Mikado a transporté sa résidence officielle à Tokio. Ils forment une suite de onze chambres habitées par les souverains du treizième au dix-neuvième siècles (1869). L’empereur y vient rarement, mais ses appartements, sa salle du trône, sa salle à manger, sa chambre à coucher sont prêts pour le recevoir, comme nous les avons vus aujourd’hui. On n’a qu’à faire son lit sur les tatami, et il s’v endort comme sur le plus moelleux édredon. Avec deux petits bâtons il consomme son repas plus prestement que vous et moi avec nos ustensiles de table. Pour s’asseoir, il a ses talons. On est loin de Versailles et des Tuileries, mais on est chez un empereur tout de même, et l’un des plus puissants monarques du monde. Combien de temps règnera-t-il encore ? L’écroulement de l’Empire chinois, son voisin, la chute des trônes, qui se précipite dans le monde entier, doivent lui faire porter des regards inquiets sur les bases du sien toutes solides, toutes inébranlables qu’elles paraissent. La situation en Asie n’est guère plus rassurante qu’en Europe ; et si ces millions d’hommes s’entrechoquent jamais,