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L’APPEL DU CHIBOUGAMAU

tant le courant jusqu’au lac Chibougamau. Nous apercevions aussi des milliers de petits poissons blancs, de la taille des sardines, qui sautaient hors de l’eau à la poursuite des insectes. À mesure que l’été s’avançait, « Petit poisson devenait grand » et d’autres variétés de mouches apparaissaient, desquelles il se nourrissait. Ainsi se déroulait sous nos yeux le cycle de la nature.

Nous attrapions et faisions rôtir les petits poissons blancs, mais leur goût semblait fade. « Insipide est synonyme de poisson blanc », déclara l’un de mes hôtes. Ah ! Si mon ami monsieur Pouyeux du fameux restaurant « Chez son père », à Montréal, s’était trouvé parmi nous ! D’un coup de baguette magique, quelques pincées d’épices et de fines herbes, une sauce aussi mystérieuse que savante, et la poêlée se serait transformée en « plat de résistance » digne de Brillat-Savarin.

Nous badigeonnâmes de gomme laquée les murs du « camp », à l’intérieur comme à l’extérieur, afin que le bois rond conserve sa couleur primitive : cette teinte claire et brillante du sapin écorcé, qu’on ne réussit jamais à imiter par des moyens artificiels. La meilleure description qu’on en puisse faire, fut trouvée, je crois, par Mlle Louise Schaffner, vice-consul américain à Montréal, l’une de nos premières visiteuses. Mlle Schaffner, qui nous fait songer à une reine du cinéma plutôt qu’à une diplomate de carrière, regarda la nuance ensoleillée de ce bois, le caressa de la main et s’exclama : « C’est comme du satin !» Je me souviens aussi que plus tard, dans le restaurant d’un grand hôtel, à Montréal, je désignais discrètement Louise et sa mère (dont elle avait hérité la beauté) à un ami : — De bien jolies femmes, n’est-ce pas ? — En effet, me répondit-il, Louise a l’air d’une « star » et sa mère d’une « starlet ! »