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L’APPEL DU CHIBOUGAMAU

argent, s’il vous est possible de mettre la main sur quatre-vingt-dix mille dollars. » Je lui réponds qu’en effet, j’ai la main sur quatre-vingt-dix mille dollars, mais que je n’entends pas la bouger. Il me quitta sans me dire bonsoir. Un autre courtier (pourtant celui-là a l’air honnête !) émet l’avis que je devrais former une compagnie et « vider les poches des imbéciles » ; mais comme je ne suis pas né avec le cerveau d’un comptable, je décline la proposition.

Je sais que mes concessions sont placées à proximité de ce qu’on suppose être la « faille principale » longeant le lac aux Dorés ; et comme les gisements minéraux d’importance commerciale sont fréquemment situés près de ces « cassures » géologiques (d’après Von Bernewitz, Von Schnartz et autres imposants spécialistes des couches stratifiées), j’ai autant de probabilités de succès que n’importe qui. Mes claims se trouvent installés, selon l’expression pittoresque d’un prospecteur, en plein sur « la zone des bananes ».

Un savant distingué, intéressé au développement de Chibougamau et ne se souciant pas de dépouiller le public, me déclara que mes chances de succès étaient grandes et me donna des conseils quant aux emplacements où je devais forer. « Si j’étais le géologue consultant d’une compagnie propriétaire de vos claims, me dit-il, indiquant des points sur la carte géologique, c’est là que je leur conseillerais de forer. Peut-être ne frapperez-vous rien en ces endroits, mais les carottes (core) que vous ramènerez à la surface vous indiqueront les possibilités futures dans cette zone. »

Et c’est ainsi que l’avis, précieux et désintéressé, d’un des plus grands experts en mines au Canada ne me coûta qu’un cigare havane et un verre de bon whisky.

Alors que je déballe la foreuse, deux types pittoresques se joignent à notre équipe, l’un est « Joe Chibou-