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LE VIEUX MOULIN

absence et me vola un jambon avec la finesse d’un gentleman cambrioleur. Des traces de pattes m’indiquèrent qu’il avait cherché à pénétrer par l’arrière. Se rendant compte de son erreur, il ne déchira pas la toile à coups de griffes… il fit le tour de la tente, trouva le panneau lâche de l’entrée et se glissa dessous.

Il choisit un jambon parmi ma provision considérable de vivres et repartit sans abîmer quoique ce fut. Je suivis sa piste sur quelques milles : c’était facile, car il laissait sur son passage des touffes de poils grisâtres à tous les bosquets… mais je ne parvins pas à l’atteindre.

Maître Loup est, par contre, un individu aux manières des plus vilaines. Il dévore n’importe quoi : aussi bien le crin du cheval dans le canapé de votre grand’mère que le contenu d’un chaudron de navets brûlés. J’en ai déjà vu un avaler une boîte entière de levure artificielle. Il entra au ciel des loups quelques heures plus tard.

— De quoi les caribous se nourrissent-ils ? demandai-je.

— Les caribous aiment les écureuils, me dit Bob.

Revenant vers Chibougamau, je vis un orignal au bord de la route, au Mille 83. Je rapportai sa position et la date de cette rencontre au ministère de la Chasse et de la Pêche, qui tient des statistiques sur les allées et venues des animaux sauvages. J’ai appris, en lisant un bulletin de la Société historique du Saguenay, que le nom indien pour orignal est « moush ». Les anglais adaptèrent ce mot et en firent « moose ». La rivière Ashuapmouchuan contient le terme « moush » (L’orthographe des noms indiens est très fantaisiste, en anglais comme en français) : le nom entier de ce cours d’eau signifie : « Là où l’on attrape les orignaux ».

Au lac La Blanche, que longe la route nationale, le gouvernement de Québec a construit une douzaine de loges