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L’ÉPOPÉE DE L’UNGAVA

demandai pourquoi il accomplissait cet effort surhumain, il me répondit : « Je voulais avoir ma correspondance ».

Lorsque je rencontrai le prospecteur Wally McQuade, dans un magasin de quincaillerie, j’appris un nouveau truc de mineur. J’aperçus McQuade examinant à la loupe des poêlons de métal. Je lui dis en riant que les œufs auraient le même goût, qu’ils fussent frits dans un poêlon ou dans l’autre. « Je ne le veux pas pour faire la cuisine, murmura MacQuade, mais pour laver l’or à la battée. Une poêle est le meilleur instrument pour ça, à la condition qu’elle n’ait pas la moindre égratignure… C’est pourquoi je la regarde aussi attentivement. »

Les prospecteurs du Chibougamau mettaient certainement de la vie dans les calmes villages du Lac Saint-Jean. Certains émergeaient de la brousse pour acheter du matériel et des vivres ; d’autres simplement pour se distraire. Au Château Roberval, je rencontrai Mike Mitto, le mineur canadien auquel on a fait le plus de publicité. Mike avait appuyé, de son choix et de son opinion, une marque de whisky, voilà quelques années et son portrait avait paru dans des annonces, jusqu’au pays du Siam.

Mike, toujours d’une gaieté exubérante, était un prospecteur et un promoteur doué d’une expérience formidable. Son beau-frère, feu « Russian Kid », était un autre personnage pittoresque. Mike me déclara qu’il avait jalonné des claims au Chibougamau et qu’il s’en allait ailleurs. « Où allez-vous ? » demandai-je. « Au Yukon, fut la réponse ; on m’a dit qu’il y avait encore là-bas des terrains intéressants à exploiter. » Le Yukon ! Distant de cinq mille milles ! Et il y allait juste comme ça !

Alors que nous déjeunions ensemble, j’indiquai à Mike un promoteur que je connaissais vaguement et qui était attablé assez loin de nous. « Que pensez-vous de ce type-là ? » m’informai-je. Mike sourit et murmura : « Si vous lui