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L’ÉPOPÉE DE L’UNGAVA

cherché à stimuler l’intérêt public à propos des richesses du Chibougamau. La campagne de publicité avait duré tout l’hiver. Un expert montréalais en relations publiques se fit le champion de la cause et écrivit des articles à propos des couvre-chefs bizarres que portent les Indiens du Lac Mistassini ; à propos aussi d’une école d’Art dirigée dans la brousse par un ingénieur minier, et d’autres écrits d’un intérêt quelconque. Il faut admettre que c’est une rude tâche pour un rédacteur, et je doute que ces histoires, qui coûtèrent un joli prix, aient amené l’argent des spéculateurs dans la région.

Au cours de mes randonnées au Chibougamau, j’avais entendu des bribes d’histoires où il était question de cannibalisme. Un trafiquant en fourrures, m’avait-on dit, avait dévoré un guide, voilà bien des années. Je finis par connaître les faits, lorsque je rencontrai Gladstone McKenzie, un prospecteur qui avait vraiment vu le cadavre partiellement mangé.

Gladstone McKenzie est le fils de feu Peter McKenzie, le premier homme qui découvrit du métal de quelque valeur au Chibougamau. Gladstone a passé presque toute sa vie dans la brousse. Après m’avoir narré l’histoire de cannibalisme, il continua la conversation avec le récit de ses expériences dans les « pays d’en haut ». Je cite ici ce qu’il me dit en substance, car cela éclaire d’un jour révélateur l’existence au Chibougamau il y a un demi-siècle.

Durant l’hiver de 1903-04, me dit-il, « mon père établit un poste de traite au lac Ashuapmouchuan,[1] à 80 milles environ de Saint-Félicien. »

« Il me confia le poste, avec Joseph Kurtness, un pur Indien montagnais, chef de la tribu qui habitait la réserve

  1. « Ashuapmouchuan » est un terme indien qui signifie : « Là où l’on attrape les orignaux ». (Voir le chapitre suivant pour une explication plus complète.)