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L’APPEL DU CHIBOUGAMAU

m’aurait fallu marcher du Bras du Sud-Ouest jusqu’au bout de la péninsule Gouin, soit une distance de quinze milles à travers une brousse épaisse, sans même un sentier pour me guider.

Au « townsite » je rencontrai des douzaines de prospecteurs quittant le Chibougamau pour la durée de cette période de gel. Plusieurs en profitaient pour se rendre à Montréal, Toronto, New-York et autres grandes villes, où ils vendaient les propriétés acquises durant l’été et obtenaient les moyens nécessaires pour accomplir de futures explorations. Certains prospecteurs se retiraient simplement, durant cette morte-saison, à l’hôtel Bellevue de Saint-Félicien ou au Château Roberval et à la Maison blanche de Roberval, passant agréablement le temps dans ces confortables hôtelleries.

Quelques jours avant Noël, on apprit que les cours d’eau du Chibougamau étaient gelés pour de bon, et de nouveau, une petite armée de prospecteurs abandonna le luxe de la civilisation pour se replonger dans les solitudes frigorifiées du Nord. Ces hommes reprenaient leur incessante chasse au trésor, et ni la neige, ni la glace ne sauraient leur barrer la route.

Dès la première chute abondante de neige, les gardes-feu menèrent à bien un exploit qui eut été impossible en n’importe quel autre temps de l’année. Au moyen de traîneaux et de chiens, ils hissèrent une tour d’acier de 80 pieds jusqu’au faîte du mont Cummings, à cinq milles au nord de Rainbow Lodge. La tour fut transportée par sections, destinées à être assemblées et érigées l’été suivant. Du haut de cette tour, les gardes-feu pourraient observer, à l’œil nu, plus de quarante milles de forêt dans toutes les directions.

Je roulai jusqu’au Chibougamau, tout du long des 150 milles de la route d’hiver, dans le camion du prospecteur