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put rassembler de l’armée régulière, et fit un effort désespéré pour écraser « les rebelles », comme on les appela de nouveau, et comme ils s’appelaient eux-mêmes.

Il était trop tard. Toute idée de paix fondée sur un compromis avait disparu des deux côtés. La fin, on le voyait clairement, devait être ou l’esclavage absolu pour tous, excepté les privilégiés, ou un système de vie basé sur l’égalité et le communisme. L’indolence, la désespérance, et, si l’on peut dire, la lâcheté du dernier siècle avaient fait place à l’héroïsme impatient et agité d’une période révolutionnaire déclarée. Je ne dirai pas que le peuple de cette époque prévoyait la vie que nous menons aujourd’hui, mais il entrevoyait d’instinct l’essentiel de cette vie, et beaucoup d’hommes voyaient clairement, au-delà de la lutte désespérée du moment, la paix vers laquelle elle menait. Les hommes de ce temps qui étaient du parti de la liberté n’étaient pas malheureux, je crois, — bien qu’ils fussent tourmentés d’espoirs et de craintes, et parfois déchirés par le doute, et par des conflits de devoirs difficiles à concilier.

— Mais comment le peuple, les révolutionnaires, conduisirent-ils la guerre ? Quels éléments de succès y avait-il de leur côté ?

Je posai cette question, parce que je voulais ramener le vieillard à l’histoire précise, et le détourner des gloses si naturelles à un vieillard.

Il répondit :

— Ils ne manquèrent pas d’organisateurs.