Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/183

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Il faut réprimer l’avidité insatiable des basses classes. » — « Il faut donner au peuple une leçon. » Telles étaient les phrases sacramentelles qui couraient parmi les réactionnaires, et c’était un sinistre présage.

Le vieillard s’arrêta et fixa ma figure attentive et étonnée ; puis il dit :

— Je sais, cher Hôte, que j’ai prononcé des mots et des phrases que peu de personnes, parmi nous, pourraient comprendre sans de longues et laborieuses explications, qui même ne suffiraient peut-être pas. Mais puisque vous ne vous êtes pas encore endormi, et puisque je vous parle comme à un être d’une autre planète, je peux me risquer à vous demander si vous m’avez suivi jusqu’ici ?

— Oh ! oui, je comprends très bien ; je vous en prie, continuez ; une grande partie de ce que vous avez dit était des lieux communs chez nous,… lorsque… lorsque…

— Oui, dit-il sérieusement, lorsque vous habitiez l’autre planète. Eh bien ! maintenant, la débâcle dont j’ai parlé.

Pour un motif relativement peu important, une grande réunion fut convoquée par les chefs des ouvriers, pour être tenue à Trafalgar-Square (lieu où l’on s’était chamaillé, bien des années auparavant, au sujet du droit de réunion). La garde civique des bourgeois — appelée la police — attaqua cette réunion avec des gourdins, selon son habitude ; beaucoup de gens furent blessés dans la mêlée[1], dont cinq

  1. En français dans le texte.