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une troupe armée en pays ennemi. Mais nous, qui vivons parmi nos amis, n’avons ni à craindre ni à punir. Certainement, si, par crainte d’un rare homicide éventuel, d’une brutalité éventuelle, nous devions solennellement et légalement commettre homicide et violence, nous ne pourrions être qu’une société de féroces couards. Ne le croyez-vous pas, voisin ?

— Oui, je le crois, quand je me mets à envisager les choses de ce côté.

— Vous devez pourtant comprendre, dit le vieillard, que, lorsqu’une violence quelconque est commise, nous comptons que le coupable lui-même fera toute la réparation qui lui sera possible, et lui-même y compte. Mais, là encore, réfléchissez si la destruction ou un dommage grave infligé à un homme momentanément dominé par la colère ou la folie peut être une réparation pour la communauté ? Évidemment, cela ne peut être pour elle qu’un dommage de plus.

Je dis :

— Mais supposez qu’un homme ait l’habitude de la violence,… qu’il tue un homme par an, par exemple ?

— Pareille chose est inconnue. Dans une société où il n’y a pas de punition à éviter, pas de loi à tourner, le remords suivra certainement la faute.

— Et les moindres éclats de violence, demandai-je, comment les traitez-vous, car jusqu’à présent nous avons parlé des grandes tragédies, je crois.