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DE DORIAN GRAY

— Parce que j’ai promis à lord Henry Wotton d’aller avec lui.

— Il ne vous en voudra pas beaucoup de manquer à votre parole ; il manque assez souvent à la sienne. Je vous demande de n’y pas aller.

Dorian Gray se mit à rire en secouant la tête…

— Je vous en conjure…

Le jeune homme hésitait, et jeta un regard vers lord Henry qui les guettait de la table où il prenait le thé, avec un sourire amusé.

— Je veux sortir, Basil, décida-t-il.

— Très bien, répartit Hallward, et il alla remettre sa tasse sur le plateau. Il est tard, et comme vous devez vous habiller, vous feriez bien de ne pas perdre de temps. Au revoir, Harry. Au revoir, Dorian. Venez me voir bientôt, demain si possible.

— Certainement…

— Vous n’oublierez pas…

— Naturellement…

— Et… Harry ?

— Moi non plus, Basil.

— Souvenez-vous de ce que je vous ai demandé, quand nous étions dans le jardin ce matin…

— Je l’ai oublié…

— Je compte sur vous.

— Je voudrais bien pouvoir compter sur moi-même, dit en riant lord Henry… Venez, M. Gray, mon cabriolet est en bas et je vous déposerai chez vous. Adieu, Basil ! Merci pour votre charmante après-midi.

Comme la porte se fermait derrière eux, le peintre s’écroula sur un sofa, et une expression de douleur se peignit sur sa face.