nouvel idéal, Harry. Je veux changer ; je pense que je le suis déjà.
— Vous ne m’avez pas encore dit quelle était votre bonne action ; ou bien me disiez-vous que vous en aviez fait plus d’une ? demanda son compagnon pendant qu’il versait dans son assiette une petite pyramide cramoisie de fraises aromatiques, et qu’il la neigeait de sucre en poudre au moyen d’une cuiller tamisée en forme de coquille.
— Je puis vous la dire, Harry. Ce n’est pas une histoire que je raconterai à tout le monde… J’ai épargné une femme. Cela semble vain, mais vous comprendrez ce que je veux dire… Elle était très belle et ressemblait étonnamment à Sibyl Vane. Je pense que c’est cela qui m’attira vers elle. Vous vous souvenez de Sibyl, n’est-ce pas ? Comme cela me semble loin !… Hetty n’était pas de notre classe, naturellement ; c’était une simple fille de village. Mais je l’aimais réellement ; je suis sûr que je l’aimais. Pendant ce merveilleux mois de mai que nous avons eu, j’avais pris l’habitude d’aller la voir deux ou trois fois pas semaine. Hier, elle me rencontra dans un petit verger. Les fleurs de pommier lui couvraient les cheveux et elle riait. Nous devions partir ensemble ce matin à l’aube… Soudainement, je me décidai à la quitter, la laissant fleur comme je l’avais trouvée…
— J’aime à croire que la nouveauté de l’émotion doit vous avoir donné un frisson de vrai plaisir, Dorian, interrompit lord Henry. Mais je puis finir pour vous votre idylle. Vous lui avez donné de bons conseils et… brisé son cœur… C’était le commencement de votre réforme ?
— Harry, vous êtes méchant ! Vous ne devriez pas