sade. Vous devriez sûrement être content de penser que, bien que vous partiez, vous me laissez plus heureuse que je n’ai jamais été. La vie a été dure pour nous, terriblement dure et difficile. Maintenant ce sera différent. Vous allez vers un nouveau monde, et moi j’en ai découvert un !… Voici deux chaises, asseyons-nous et regardons passer tout ce beau monde.
Ils s’assirent au milieu d’un groupe de badauds. Les plants de tulipes semblaient de vibrantes bagues de feu. Une poussière blanche comme un nuage tremblant d’iris se balançait dans l’air embrasé. Les ombrelles aux couleurs vives allaient et venaient comme de gigantesques papillons.
Elle fit parler son frère de lui-même, de ses espérances et de ses projets. Il parlait doucement avec effort. Ils échangèrent les paroles comme des joueurs se passent les jetons. Sibyl était oppressée, ne pouvant communiquer sa joie. Un faible sourire ébauché sur des lèvres moroses était tout l’écho qu’elle parvenait à éveiller. Après quelque temps, elle devint silencieuse. Soudain elle saisit au passage la vision d’une chevelure dorée et d’une bouche riante, et dans une voiture découverte, Dorian Gray passa en compagnie de deux dames.
Elle bondit sur ses pieds.
— Le voici ! cria-t-elle.
— Qui ? dit Jim Vane.
— Le Prince Charmant ! répondit-elle regardant la victoria.
Il se leva vivement et la prenant rudement par le bras :
— Montrez-le moi avec votre doigt ! Lequel est-ce ? je veux le voir ! s’écria-t-il ; mais au même moment le mail du duc de Berwick passa devant eux, et lorsque la place