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« En été et en automne, j’avais l’habitude d’aller passer, une semaine, sans interruption, à la campagne, ou sur les rives de Long-Island.

« Là, en présence des influences de plein air, je parcourus, d’un bout à l’autre, l’Ancien et le Nouveau Testament, et j’absorbai, (probablement d’une manière plus avantageuse pour moi, que je ne l’eusse fait dans une bibliothèque, ou dans une chambre close — il y a tant de différence, selon l’endroit où on lit) Shakespeare, Ossian, les meilleures traductions que je pus me procurer d’Homère, d’Eschyle, de Sophocle, les vieux Nibelungen allemands, les antiques poèmes hindous, et un ou deux autres chefs-d’œuvre, entre autres celui du Dante.

« Le hasard fit que je lus la plus grande partie de ce dernier dans une vieille forêt.

« Pour l’Iliade… je la lus pour la première fois d’un bout à l’autre sur la presqu’île d’Orient, à l’extrêmité Nord-Est de Long-Island, dans un creux de rocher et de sable abrité, la mer de chaque côté.

« Depuis je me suis demandé pourquoi je n’ai point été accablé par ces maîtres puissants.

« C’est probablement parce que je les lisais, ainsi que je l’ai décrit, bien face à face avec la Nature, en plein soleil, devant la vaste perspective d’un paysage pittoresque, ou des flots de la mer ».

L’amusante boutade de dogmatisme, où Edgar Allan Poë nous dit qu’étant donné nos occasions et notre époque, « il ne peut rien y avoir de mieux qu’un poème » le fascina.

« Déjà la même pensée m’avait hanté l’esprit, dit-