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remue par la belle sincérité de son objet, sa pensée hautaine et passionnée, la profondeur et l’ardeur dans l’intensité du sentiment.

« L’emprisonnement, dit dans sa préface M. Blunt, est une réalité de discipline fort utile pour l’âme moderne, bercée qu’elle est par la paresse et le laisser-aller physique. Ainsi qu’une maladie ou une retraite spirituelle, il purifie et ennoblit, et l’âme en émerge plus forte et plus concentrée en soi ».

Certainement l’emprisonnement fut pour lui une manière de purification.

Les sonnets du début, composés dans la morne cellule de la prison de Galway et écrits sur les feuillets de garde du livre de prières du prisonnier, sont pleins de choses noblement pensées, noblement exprimées, et montrent que, si M. Balfour peut imposer le « régime de droit commun par ses réglements sur les prisons », il ne saurait empêcher « la hauteur de pensée », non plus que limiter, gêner en quoi que ce soit la liberté d’une âme d’homme.

Ce sont naturellement des œuvres d’une personnalité intense dans son expression.

Il ne pouvait en être autrement.

Mais la personnalité qu’elles révèlent n’a rien de mesquin, rien de bas.

Le cri pétulant de l’égoïste superficiel qui était la marque caractéristique des Sonnets d’amour de Proteus ne se trouve plus ici.

Il a fait place à une douleur ardente, à un dédain terrible, à une rage farouche, à une passion pareille à la flamme.