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monde qui lit trop pour être sage et pense trop pour être beau.

Sans le terrain de course à pied d’Eton, sans la piste à remorquage d’Oxford, sans les écoles de natation de la Tamise, et les cirques annuels, l’humanité oublierait la perfection plastique et dégénérerait en professeurs myopes et précieuses à lunettes.

Ce n’est pas que les propriétaires de cirques, en général, aient conscience de leur haute mission.

Est-ce qu’ils ne nous assomment pas avec la haute école et ne nous ennuient pas avec leurs clowns à la Shakespeare ?

Mais enfin, ils nous présentent des acrobates, et l’acrobate est un artiste.

Le seul fait qu’il n’adresse jamais la parole au public montre combien il est convaincu de cette grande vérité que le but de l’art n’est point de faire paraître la personnalité, mais de plaire.

Le clown peut être braillard, mais l’acrobate est toujours beau.

Il est une combinaison intéressante de l’essence de la sculpture grecque avec le bariolage du costumier moderne.

Il a même eu son compartiment dans les romans de notre siècle et si dans Manette Salomon, le modèle est démasqué, les Frères Zemganno sont l’apothéose de l’acrobate.

En ce qui concerne l’influence du modèle ordinaire sur notre école anglaise de peinture, on ne saurait dire qu’elle soit absolument bonne.

Certes, c’est un avantage pour un jeune artiste en-