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en émoi les passagers. Puis, le banquier, sa sœur et son fils parlèrent de certaines particularités du lac, de la pêche, des riverains et d’autres choses semblables qui pouvaient offrir quelque intérêt. Dougaldine et Jean se bornaient à répondre aux questions qu’on leur adressait directement. Ainsi que deux adversaires qui n’osent pas avouer leur sourde animosité, ils s’observaient à la dérobée, mais avec tant de précaution que les regards de l’un ne rencontraient jamais ceux de l’autre.

Le souper terminé, M. Fininger proposa au docteur de fumer encore un cigare sur la terrasse. Mlle Marthe conduisit Amédée dans sa chambre à coucher. Elle le mit au lit, borda ses couvertures et ne le quitta qu’après qu’il se fut endormi. Quant à Dougaldine, elle était descendue au bord du lac où elle se promena longtemps, toujours en lutte contre son cœur et les pensées nouvelles qui la troublaient. Lorsqu’elle entendit le précepteur de son frère se retirer, elle rejoignit son père et causa quelques instants avec lui. Ensuite, ils allèrent à leur tour chercher le repos et, une heure après, toutes les lumières de la maison étaient éteintes. Seul, dans un ciel d’azur foncé, tout piqué d’étoiles d’or, montait lentement le croissant de la lune qui projetait sa pâle clarté sur le sable jaune des allées du jardin.