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LA PATRICIENNE

de Dougaldine coupa lestement toute discussion sur ce sujet, en disant :

— Et à quel temps de la journée pensez-vous donner vos leçons ?

— De sept à dix heures du matin.

— Vous êtes matinal, plaisanta M. Fininger. Soit. Cela ne nuira pas à mon garçon. Mais, à cette heure, vous risquez bien de ne rencontrer personne de la famille. Dois-je annoncer à Amédée que, dès demain, cet arrangement entre aussitôt en vigueur ?

— Oui, je vous en prie.

Le docteur s’inclinait déjà pour partir. Mais M. Fininger s’empara de sa main, la serra cordialement et l’accompagna jusqu’à la porte, où il prit seulement congé de lui.

— Ce sont de braves gens, murmura Jean Almeneur, en sortant de la maison. S’il l’eût osé, il aurait traduit cette impression, qui ne marquait pas un trop grand enthousiasme, par d’autres mots, plus vrais à ses yeux, du moins il se l’imaginait, peut-être par ceux-ci :

— Ce sont réellement de nobles caractères. Et ils sont encore bien plus nobles que leurs opinions. Dougaldine m’apparaît comme le soleil de cette antique demeure. Elle en est l’âme, et la lumière. Le père et le frère ne sont certainement pas indignes d’elle.

Il ne lui vint pas à l’esprit que lui, également, avait autant de valeur morale que cette famille patricienne. Il pensait aux autres sans songer à lui. N’était-ce pas l’indice infaillible que l’amour épanouissait sa première fleur au fond de son cœur ?