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LA PATRICIENNE

pièce à côté, d’où elle envoya bientôt Juliette avec une lampe, car la nuit tombait rapidement.

M. Fininger et Jean se trouvaient seuls. Le père de Dougaldine était un homme de haute stature, et, comme nous l’avons dit, il approchait de la cinquantaine. Ses yeux vifs tempéraient l’expression de sévérité qui reposait sur son front et dans les traits presque marmoréens de son visage. De même, une nuance de bonté se remarquait autour de la bouche, Qui semblait contredire la dureté de la physionomie.

Il salua le jeune savant de la manière la plus cordiale.

M. le professeur Grégor vous a donc fait part de mon dessein, commença-t-il, et vous êtes, je n’en Puis douter, disposé à donner quelques leçons à mon fils ?

— En vérité, je dois vous avouer une chose : Je venais chez vous dans l’intention de vous engager à renvoyer votre fils dans nos écoles, qui, à mon humble avis, sont excellentes. S’il s’agissait d’une fille, je n’aurais rien à objecter. La vie publique n’est pas sans danger pour un être sensible, impressionnable. Mais, nous autres hommes, plus tôt nous entrons en rapports fréquents avec le monde, plus nos forces se mesureront avec d’autres forces, plus le frottement…

— Halte ! s’écria M. Fininger. Voilà le grand mot lâché. Je savais que vous le prononceriez. Toujours ce frottement ! Et on ne songe pas, quand on enfourche ce dada, que l’enfant va perdre, dans cette existence nouvelle pour lui, les meilleures qualités que cultive la famille. On se donne toutes les peines possibles pour bien élever ses fils, leur inspirer des sen-