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LA PATRICIENNE

était donc restée au salon, bien que la visite ne la concernât point. Aussi, estimant qu’elle avait satisfait aux règles de la politesse, d’autant plus que cet étranger osait encore la contredire, elle indiqua enfin un siège, tout en ajoutant d’un ton indifférent :

— Vous pouvez prendre place, monsieur, car ce n’est guère avant une demi-heure que papa rentrera. Il est vrai qu’on serait plus sûr de le trouver à son bureau, fit-elle, comme pour dire au docteur qu’elle ne souhaitait plus sa présence.

Et elle voulut partir.

Mais Jean ne l’entendait pas ainsi.

— Je ne viens pas chez monsieur votre père pour affaires, mademoiselle, reprit-il d’une voix mordante. Il s’agit d’une chose qui intéresse plus spécialement votre famille. En un mot, M. le professeur Grégor m’a annoncé hier que M. votre père cherche un précepteur.

La patricienne avait d’abord eu l’intention de l’arrêter net, ou de s’éloigner sans attendre la fin de sa phrase. Elle s’en allait effectivement. Mais, aux derniers mots du docteur, elle se retourna vivement et, revenant sur ses pas, elle lui dit, d’un accent plus doux :

— Oh ! si c’est pour ce motif que vous venez, papa se réjouira grandement, monsieur le docteur. Et… oui, je puis bien vous le dire, cette affaire me tient beaucoup à cœur. Car c’est moi qui ai conseillé à papa de retirer Amédée des écoles de la ville.

— Vous, mademoiselle ! dit Jean, au comble de l’étonnement.

— Oui, moi-même ! répliqua la patricienne.

Elle déployait, dans ses réponses et dans ses actes,