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LA PATRICIENNE

qui fréquentaient son église des reproches pour ceux de ses paroissiens qui n’y mettaient pas les pieds.

Puis il termina :

— Eh bien, mon cher docteur, quelle est votre résolution ? Voulez-vous accepter cette place ?

En souriant, Jean fit observer au professeur qu’il ignorait encore le nom de la famille dont il s’agissait.

— C’est parbleu ! vrai, dit M. Grégor. Le père de cet enfant est un M. Fininger, un de nos patriciens les plus cultivés. Je le crois même fortement teinté de libéralisme, car il oublie opiniâtrement de mettre le « de » au bas de ses lettres, quoique sa famille soit certainement une des plus anciennes de Berne. Je suppose que ses ancêtres, comme d’ailleurs ce même nom semble l’indiquer, ont dû jadis défendre quelque frontière. M. Fininger est un grand et richissime banquier, vous le savez peut-être.

— Je ne le connais pas, répliqua le docteur. Mais, une chose m’étonne ! Si ce patricien est si intelligent, si moderne — l’expression est admise, je crois — que vous voulez le dire, comment se fait-il qu’il n’envoie pas son fils dans les écoles de la ville ? Ce serait, cependant, pour ce dernier, beaucoup plus avantageux. Nos écoles, et avec raison, passent pour très bonnes. On a même l’embarras du choix : si le gymnase ne lui convient pas, à cause de son enseignement trop libéral, il lui reste toujours le grand institut conservateur de monsieur…

— Je vous arrête. Cette dernière école lui déplaît particulièrement. On y pousse trop loin le piétisme. Il n’a jamais voulu envoyer son fils dans cet établissement. Pourquoi le retire-t-il du gymnase ? Je ne saurais vous le dire. En tout cas, il a nécessairement